
Weekly Update - Zone euro : les taux d’intérêt toujours élevés du crédit inciteront la BCE à aller plus loin
Cela fait maintenant un an que la Banque Centrale Européenne (BCE) assouplit sa politique monétaire, avec un taux directeur qui est passé de 4 % à 2 % en 12 mois. Si cette baisse est massive, elle ne s’est transmise que très partiellement aux taux d’intérêt de plus long terme, tant sur le marché obligataire que sur les taux des crédits bancaires. Cette faible transmission modère les impacts de la détente monétaire. La BCE pourrait ainsi être incitée à renforcer cette détente d’ici la fin de l’année, dans un contexte de nette baisse de l’inflation et de croissance modérée.
La BCE a baissé une nouvelle fois ses taux et adopté une communication attentiste. Lors de la réunion du 5 juin, le taux directeur de la banque centrale a été abaissé de 25 points de base à 2,00 %. En parallèle de cette nouvelle baisse, la BCE a mis à jour ses prévisions et revoit nettement à la baisse sa prévision d’inflation, du fait de la diminution du prix du pétrole et de l’appréciation de l’euro (inflation prévue dorénavant à 2 % pour 2025, 1,6 % pour 2026 et 2 % pour 2027). Pour autant, elle maintient quasi inchangées ses prévisions d’inflation sous-jacente (à 2,4 % en 2025, 1,9 % pour 2026 et 2027) et de croissance (0,9 %, 1,1 % et 1,3 %), et souligne que la banque centrale se rapproche dorénavant de la fin de son cycle de baisses de ses taux. La BCE a en effet commencé à baisser ses taux depuis un an et considère sa politique actuelle comme « bien positionnée », ce qui laisse présager que, sans nouveau choc, elle pourrait dorénavant garder sa politique inchangée.
Une faible transmission aux taux de plus long terme. Depuis que la BCE a entamé son cycle de baisse des taux courts, les taux sur les marchés obligataires souverains sont restés quasiment stables : les taux à 10 ans allemands et français naviguent respectivement autour de 2,5 % et 3,2 % depuis plus d’un an. Plusieurs facteurs expliquent cette stabilité. Tout d’abord, la croissance nominale reste plus élevée qu’avant le COVID, avec notamment une inflation proche de l’objectif de 2 % de la banque centrale, ce qui justifie un niveau de taux d’intérêt d’équilibre durablement plus élevé. Ensuite, le marché des obligations souveraines apparaît sous tension, avec d’un côté une offre en augmentation, dans un contexte de progression des dettes publiques (y compris en perspective en Allemagne avec le plan de soutien prévu), et une partie de la demande en diminution, avec des banques centrales qui poursuivent leurs programmes de réduction de leur bilan (opérations de Quantitative Tightening). Ces tensions vont au-delà des seuls marchés de la zone euro, avec des taux qui restent élevés aux États-Unis et qui progressent au Japon. Ce qui dénote en zone euro, c’est que les taux longs souverains restent élevés alors que la Banque centrale a déjà nettement baissé ses taux.
Une incitation pour la BCE à poursuivre la détente. Ce maintien des taux de long terme de référence à un niveau élevé modère la détente des taux de crédits bancaires. Ainsi, les taux de nouveaux crédits immobiliers ont diminué depuis leurs points hauts de fin 2023 (cf. graphique), mais restent malgré tout nettement plus élevés qu’avant le COVID. La reprise du crédit bancaire reste aussi modérée, tant du côté des ménages que du côté des entreprises, limitant la bonne transmission du caractère plus accommodant de la politique monétaire aux économies. Cette transmission partielle de la détente des conditions monétaires pourrait inciter la BCE à aller plus loin dans la baisse de son taux directeur, surtout dans un contexte de court terme de croissance affaiblie (avant la mise en place effective des plans de soutien) et de baisse de l’inflation du fait de la baisse des prix du pétrole en euros.
Autres faits marquants de la semaine
Dans les événements marquants de la semaine, nous avons choisi d'évoquer la révision à la baisse par l’OCDE de ses prévisions de croissance aux États-Unis et la baisse de l’ISM dans le secteur manufacturier et des services.
L’OCDE révise à la baisse ses prévisions de croissance aux États-Unis, mais maintient celles sur la zone euro. Aux États-Unis, la prévision de croissance de 2025 est nettement abaissée par rapport à l’estimation de mars, atteignant 1,6 % contre 2,2 % prévu initialement. L’OCDE explique cette baisse par l’effet des droits de douane ainsi que l’incertitude liée à l’action du gouvernement de façon générale, qui provoque un affaiblissement de la consommation et une réduction des investissements. L’inflation devrait quant à elle fortement augmenter pour atteindre 3,9 % en 2025 (contre 2,8 % prévu initialement), avant de refluer en 2026. Concernant la zone euro, l’OCDE maintient ses prévisions de croissance de 1 % en 2025 et de 1,2 % pour 2026. L’activité sera soutenue par l’assouplissement des conditions financières, le déclin des prix de l’énergie et le soutien du plan NextGenEU. L’estimation d’inflation reste elle aussi inchangée, autour de 2 % pour 2025 et 2026.
États-Unis : baisse de l’ISM dans le secteur manufacturier et celui des services. L’ISM manufacturier a reculé à 48,5 en mai, soit en dessous du seuil des 50 points qui signale une contraction de l’activité. C’est le troisième mois consécutif que l’indice est en zone de contraction. Dans le détail, la faiblesse de l’indice est expliquée par la sous-composante des nouvelles commandes qui reste en zone de contraction à 47,6 et le sous-indice de l’emploi à 46,8. Dans le secteur des services, la situation se dégrade également. L’ISM services est en effet tombé à 49,9, à rebours du consensus qui anticipait 52. L’indice des nouvelles commandes passe lui aussi en territoire négatif à 46,4, conséquence probable de l’amenuisement des effets de front-loading (anticipations d’achats en amont de la hausse des droits de douane) liés aux droits de douane et des fortes incertitudes sur la direction de la politique économique. L’emploi reste stable aux États-Unis. Le marché du travail reste robuste aux États-Unis. Le taux de chômage se maintient à 4,2 %, en ligne avec les attentes du consensus. En revanche, la hausse des salaires s’est révélée plus forte qu’anticipé, à 0,4 % sur un mois.
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