
Art Banking - Arts d'Afrique, d'Océanie, des Amériques et d'Asie du Sud Est
Dans un monde où l'art transcende les frontières géographiques et culturelles, les arts d'Afrique, d'Océanie, d'Asie du Sud-Est et d'Amérique du Nord occupent une place unique, mêlant histoire, spiritualité et esthétique. Ces œuvres, souvent qualifiées d'« arts premiers », suscitent un intérêt croissant auprès des collectionneurs et amateurs d'art du monde entier. Mais qu'est-ce qui définit réellement ces objets d'exception ? Quels sont les critères qui en déterminent la valeur, et comment le marché évolue-t-il face à une demande de plus en plus mondialisée et exigeante ?
Pour répondre à ces questions, Laurent Issaurat, Responsable du service Art Banking de Société Générale Private Banking, s'est entretenu avec Alexis Maggiar, Directeur international des Arts d’Afrique et d’Océanie et Vice-président de Christie’s France. Fort de son expertise et de son expérience de plus de deux décennies dans ce domaine, Alexis Maggiar partage son regard éclairé sur les spécificités de ces œuvres, les tendances du marché et les conseils essentiels pour les collectionneurs, qu'ils soient novices ou aguerris. Une plongée fascinante au cœur d'un univers artistique riche en histoire et en émotions.
Comment définir les « arts premiers » ?
Alexis Maggiar : La terminologie a souvent suscité des débats, et l’appellation choisie par le musée du quai Branly en est sans doute l’exemple le plus révélateur. Pour ma part, je préfère utiliser le terme « Arts d’Afrique et d’Océanie ». Il s’agit d’une désignation très générale qui mérite d’être précisée. Certains parlent, par exemple, d’« art classique » ou d’« art ancien » d’Afrique, en opposition à l’« art contemporain » africain.
Mais qu’entend-on réellement par « ancien », lorsque les œuvres relevant de mon champ d’expertise vont du XIIᵉ siècle, pour certaines pièces du Mali par exemple, jusqu’au début du XXᵉ siècle
La notion d’ancienneté suppose, selon moi, deux critères essentiels : d’une part, que l’objet ait eu un usage rituel ou fonctionnel, et d’autre part, qu’il n’ait pas été créé à des fins commerciales. C’est à ces conditions qu’un objet peut être considéré comme véritablement « authentique ».
Au-delà de l’Afrique et de l’Océanie, notre domaine d’expertise s’étend aujourd’hui à l’art d’Asie du Sud-Est ainsi qu’à l’Art d’Amérique du Nord.
Qu’est-ce qui fait la « valeur » d’un objet de cette catégorie ?
A.M. : Depuis ma découverte des arts d’Afrique et d’Océanie, il y a une vingtaine d’années, alors que j’étais stagiaire chez Christie’s, je ne cesse d’être émerveillé. Jusque-là, j’étais avant tout amateur d’art du XXe siècle, et là, sous mes yeux, sur une table, j’ai soudainement découvert quelque chose dont je n’avais pas conscience jusque lors. Ce qui m’a frappé, c’est la qualité formelle de ces œuvres en premier lieu, et leur diversité.
En termes de valorisation, les œuvres les plus prisées sont celles où l’on reconnaît que l’on est face au travail d’un artiste, dont on décèle la main, et que celles-ci se situent dans le haut du corpus d’œuvres comparables. Comme dans tout mouvement artistique dans le monde, quelle que soit sa région, il y a des vagues, avec ses points culminants, et ensuite, une forme de dégénérescence du style. Ainsi, aux critères d’ancienneté et d’authenticité, j’ajouterais aujourd’hui un critère fondamental : la beauté. Une beauté subjective, certes, mais essentielle. Frans Olbrechts, au début du XXe siècle, invitait à se poser la question de savoir si l’on se trouvait face à une œuvre réalisée par la main d’un maître, d’un artiste, qui dépasse le style d’une ethnie. Même en l’absence de signature, certaines œuvres témoignent d’une maîtrise telle qu’il est parfois possible de les attribuer à un individu, aussi anonyme soit-il. Parmi ces artistes les plus connus, je mentionnerais, par exemple, les œuvres Kota réalisées par le maître de la Sebe, dont nous avons vendu un merveilleux exemplaire en octobre dernier chez Christie’s.
« Styles » ou « régions » incontournables dans le marché
A.M. : Outre l’essor et l’engouement croissants pour les arts d’Océanie, certaines tendances de marché se dessinent aujourd’hui de manière assez nette pour les arts d’Afrique. Aujourd’hui, l’art du Nigeria et du Cameroun, souvent caractérisé par des patines épaisses et une esthétique « expressionniste », suscite actuellement moins d’intérêt sur le marché international. Il est ainsi possible d’acquérir des œuvres majeures de ces régions à des prix relativement abordables. À l’inverse, l’art d’Afrique de l’Ouest continue de susciter un fort engouement auprès des collectionneurs.
D’autre part, il existe des « stars » dans ce marché, comme les Fang du Gabon, qui font l’objet d’un désir ancien et constant. Nous avons d’ailleurs établi le record absolu pour une œuvre d’art d’Afrique vendue aux enchères avec l’iconique tête Fang de la collection Barbier-Mueller, adjugée près de 15 millions d’euros en mars dernier.
La naissance du marché
A.M. : Le marché naît véritablement au début du 20ème siècle, notamment grâce au travail de grands marchands, à Paris et New York, tels que Joseph Brummer, Alfred Stieglitz, Charles Ratton ou encore Paul Guillaume. Leur rôle, étroitement lié aux grands courants artistiques d’avant-garde, rend cette période particulièrement passionnante.
Les surréalistes, par exemple, étaient fascinés par les arts d’Amérique du Nord. Objets témoins pour les cubistes, objets de provocation pour les dadaïstes, objets poèmes pour les surréalistes, objets mythes pour les expressionnistes abstraits. Tout au long de la première moitié du 20ème siècle, les sculptures des artistes africains, océaniens et amérindiens ont accompagné les révolutions culturelles. Chacun de ces artistes occidentaux a vu dans ces objets de la beauté, de la féérie, de la remise en question.
Qui sont les collectionneurs ?
A.M. : La typologie des collectionneurs a énormément évolué, en grande partie parce que le marché s’est clairement mondialisé. Paris reste le centre historique de cette catégorie, où se tiennent les grandes ventes, mais les acheteurs viennent désormais des quatre coins du monde : Australie, Asie, Europe, États-Unis, Amérique du nord, Amérique du Sud, etc.
En termes de profils, nous accueillons de plus en plus d’amateurs d’art déjà clients de notre maison, qui n’avaient jusqu’à présent jamais acquis d’œuvres d’Afrique ou d’Océanie. Ce sont souvent des profils pluridisciplinaires, curieux et ouverts, pour qui les frontières entre les catégories artistiques tendent à s’effacer. Pour ces amateurs, il est tout à fait naturel de faire dialoguer un tableau avec une sculpture, une pièce de design avec une œuvre classique d’Afrique ou d’Océanie. Ce sont précisément ces conversations entre cultures, époques et disciplines qui nourrissent leur démarche et leur regard.
Comment le marché évolue-t-il ?
A.M. : Il est difficile d’estimer avec précision l’évolution globale du marché en valeur, notamment en raison du caractère confidentiel des transactions privées. Ce que l’on observe clairement, en revanche, c’est un intérêt croissant des collectionneurs pour les pièces de qualité supérieure, au détriment des œuvres de valeur plus moyenne. Ce phénomène n’est d’ailleurs pas propre à notre domaine, il traverse aujourd’hui l’ensemble du marché de l’art.
En termes de prix, il est important de souligner que, dans ma spécialité, il est encore possible d’acquérir de véritables chefs-d’œuvre pour quelques milliers ou dizaines de milliers d’euros. Je pense, par exemple, à une sublime massue des îles Tonga, finement gravée, ou à une statue Tellem du Mali, à la patine croûteuse et féérique.
À l’autre extrémité du spectre, certaines œuvres peuvent atteindre plusieurs millions d’euros. Mais quelle que soit la gamme de prix, je suis convaincu qu’il ne faut rien s’interdire. Avant de commencer à acheter, il est utile de prendre le temps de comprendre ce que l’on aime, que ce soit pour des raisons esthétiques, historiques ou intellectuelles.
Chez Christie’s, nous faisons un effort tout particulier pour ne présenter que des œuvres répondant aux standards les plus exigeants en matière de qualité et de rareté.
Comment se prémunir contre le risque de faire une très grosse erreur ?
A.M. : Prendre le temps d’explorer, de visiter des expositions, de consulter des ouvrages de référence et d’échanger avec des spécialistes fait pleinement partie du cheminement et contribue à nourrir un regard plus éclairé.
Dans le marché actuel, je recommande de privilégier des pièces authentiques, anciennes, rares et surtout bien documentées. La traçabilité est un élément clé, elle permet non seulement de mieux comprendre l’histoire de l’objet, mais aussi de garantir et pérenniser sa valeur dans le temps.
Pour une première acquisition, il est tout à fait naturel de faire preuve de prudence. S’orienter vers des œuvres ayant déjà été publiées, exposées ou passées en vente publique. Ces éléments contribuent à établir le statut de l’œuvre, et offrent à l’amateur un cadre rassurant pour débuter sa collection.

Alexis Maggiar
Biographie d’Alexis Maggiar, Directeur international, Art d’Afrique et d’Océanie, Vice-président, Christie’s France. Avec plus de vingt ans d’expérience dans sa spécialité, Alexis Maggiar rejoint Christie’s en juin 2020 en tant que Directeur international pour l’art d’Afrique et d’Océanie. Passionné par le dialogue entre les arts et les cultures, il joue un rôle clef dans les ventes des collections d’arts premiers, à Paris comme à New York, et a contribué à la redécouverte de chefs-d’œuvre majeurs.
©Christie’s LTD 2025 - Ph : Studio Shaporo
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