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Mieux comprendre le marché de l’art
Échanges avec Laurent Issaurat – Banquier Privé en charge du Art Banking pour Société Générale Private Banking France – également historien de l’art, formé chez Christie’s Éducation et au Sotheby’s Institute.
QUEL EST L’ÉTAT DU MARCHÉ DE L’ART AUJOURD’HUI ?
Le premier semestre 2017 est orienté positivement pour les grandes maisons d’enchères, qui sont un bon indicateur des tendances du marché. Christie’s, Sotheby’s et Phillips, en particulier, enregistrent des chiffres d’affaires en progression par rapport à la même période en 2016. Pour prendre l’exemple de Christie’s, en termes de zones géographiques, les clients américains et asiatiques représentent chacun 35 % des ventes du groupe, l’Europe, l’Inde, le Moyen Orient et la Russie se partageant les 30 % restants.
QUI SONT CES ACHETEURS, CLIENTS DES MAISONS DE VENTE, ET PLUS GÉNÉRALEMENT DU MARCHÉ DE L’ART ?
Il n’y a pas de client type mais une grande variété de profils : des marchands d’art, collectionneurs, ou héritiers souhaitant céder une ou plusieurs oeuvres pour payer les droits de succession, ainsi qu’une multitude d’amateurs qui font leurs premiers pas dans le marché… Les grandes maisons d’enchères font d’ailleurs toutes le même constat : à chaque vente, de nouveaux clients affluent, qui peuvent représenter jusqu’à 30 % des acheteurs – tout particulièrement dans les enchères on-line, signe de la vitalité du marché. Contrairement à certaines idées reçues, les transactions réalisées en maisons d’enchères ne portent pas nécessairement sur des sommes très élevées, la majorité des lots partant pour des montants inférieurs à 10 000 euros, ce qui ouvre le champ à des intervenants très divers.
LE MONDE DE L’ART A POURTANT LA RÉPUTATION D’ÊTRE UN PEU FERMÉ…
Il est vrai que cet univers a ses codes et ses références… Bon nombre de particuliers ignorent que les ventes aux enchères sont ouvertes au public ou pourraient hésiter à appuyer sur la sonnette d’un marchand d’art installé dans les étages d’un immeuble de Mayfair à Londres.
C’est un environnement dans lequel il est bénéfique d’être introduit, guidé, accompagné par des professionnels. Mais une fois que ces accès sont mis en place, l’aventure commence et les découvertes, les échanges qui en découlent, peuvent être absolument passionnants ! Lorsque nous parlons d’art, que ce soit avec un spécialiste d’une maison de vente, un galeriste, un collectionneur ou un artiste, c’est notre vision du monde qui s’enrichit.
LE FAIT QUE CE MARCHÉ NE SOIT PAS RÉGLEMENTÉ LE REND-IL PLUS OPAQUE ?
La situation est un peu paradoxale. À certains égards, le monde de l’art est très réglementé. Il suffit de penser, par exemple, au contrôle administratif des exportations de biens culturels, aux dispositifs mis en place pour restituer les oeuvres confisquées durant la seconde guerre mondiale, ou encore à la législation autour de la propriété intellectuelle dont bénéficient les artistes et leurs descendants, et tout particulièrement le droit de suite. Pourtant, dans le monde de l’art, la majorité des transactions se font de gré à gré, sont donc confidentielles et parfois réalisées dans un cadre contractuel parfois encore relativement faiblement documenté. Les mécanismes de formation des prix quant à eux varient considérablement d’un compartiment à un autre. Par exemple, dans une relation commerciale avec une galerie, une négociation peut s’engager, et dans certains cas conduire à une baisse du prix, alors qu’à l’opposé, dans une salle d’enchères, tout est organisé pour pousser les prix vers le haut… Enfin, dans certains cas de figure, un, voire plusieurs agents commerciaux se positionnent entre l’acheteur et le vendeur, créant une chaîne de commissions intermédiaires, pas toujours annoncées à l’acheteur ultime, ni au vendeur initial.
COMMENT Y VOIR CLAIR DANS CES CONDITIONS ?
Les résultats des ventes publiques peuvent être collectés, analysés et croisés avec d’autres sources d’information pour aider à se faire une opinion plus “objective” sur le prix d’une oeuvre que l’on envisage d’acquérir ou de céder…
ON PARLE PARFOIS DE “FINANCIARISATION” DU MARCHÉ DE L’ART, QU’EN PENSEZ-VOUS ?
Les marchés de l’art restent en réalité très éloignés des marchés financiers. Il s’agit d’un monde d’initiés, d’une économie de la rareté où l’on échange des oeuvres uniques, à l’opposé des marchés financiers qui sont particulièrement surveillés et conjuguent transparence maximale et atomicité de l’offre et de la demande… En revanche, l’art comme “classe d’actifs” est une notion qui me paraît plus pertinente. Elle suppose que l’acquisition, la cession, la détention ou la transmission d’une oeuvre d’art ont des conséquences financières justifiant un accompagnement professionnel. Des services tels que le “art banking”, le “wealth management” en art, les assurances spécialisées et “l’art advisory” permettent aux particuliers de se doter de moyens pour naviguer plus sereinement dans cet univers fascinant.
L’ART INTÉRESSE-T-IL PARTICULIÈREMENT SOCIÉTÉ GÉNÉRALE ?
Absolument, et à plus d’un titre. À travers notre Collection, riche de plus de 1 000 oeuvres, Société Générale a démontré son engagement dans l’art contemporain. Nous sommes devenus un acteur à part entière de cet écosystème, respecté par les artistes et leurs galeries.
Désireux de partager aussi, comme par exemple avec les 4 000 clients, étudiants et élèves qui sont venus visiter notre belle Collection cette année. Mais l’art, c’est aussi un engagement professionnel aux côtés de nos clients et clientes. De longue date, par exemple, nous offrons –avec notre partenaire 1958 Ltd– un accompagnement aux collectionneurs sur une grande variété de sujets (transactions, management de collection, philanthropie etc.), ou encore des solutions d’assurances sur mesure, destinées à protéger efficacement des actifs artistiques de valeur. Et ainsi, d’année en année, notre dispositif s’enrichit.